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Valoriser les fourrages grossiers

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La distribution de fourrages grossiers, frais, secs ou ensilés est obligatoire dans l’alimentation des monogastriques. Dès lors, il est pertinent de les utiliser au mieux afin qu’ils puissent apporter un réel complément à l’alimentation, que ce soit via le pâturage des animaux dans le cas de l’élevage plein-air ou via la distribution de fourrages conservés pour les animaux élevés en bâtiments.

Les atouts des fourrages grossiers

  • Dans les élevages en plein-air intégral, un parcours herbeux est disponible et peut offrir une ressource alimentaire complémentaire. Bien utilisé, le parcours permet de faire des économies en aliment complet
  • Pour les truies en gestation, l’apport de fibres permet de contribuer à la satiété et de réduire la frustration alimentaire engendrée par la restriction alimentaire (environ 50 à 60% de l’ingestion spontanée). Certains comportements agressifs peuvent être évités car l’apport de fourrages a un effet de lest et un effet « récréatif »
  • Pour les porcelets autour du sevrage, l’enrichissement en fibres fermentescibles de la ration permet de limiter certains troubles digestifs lors du sevrage.
  • Quand la compétition alimentaire est relativement importante, les fourrages grossiers permettent aux animaux dominés de compenser partiellement une restriction alimentaire trop intense et de se « rattraper » via l’ingestion de fourrages.
  • L’ingestion de fourrages grossiers entraine un développement plus important des organes digestifs, ce qui est favorable à l’augmentation de la capacité d’ingestion des animaux. Ce phénomène est particulièrement utile chez les truies pour favoriser une meilleure reprise de la consommation alimentaire en maternité juste après la mise-bas.

Chiffres-clés de l'alimentation chez les monogastriques

Les consommations spontanées de fourrages grossiers par des truies gestantes sont extrêmement variables d’un individu à l’autre et dépendent également de l’appétence des fourrages.

Quelques repères :

  • Sous forme de pâturage (20% MS) : de 1,5 à 2 kg de MS / truie / jour
  • Sous forme d’ensilage (35% MS) : de 0,8 à 1,6 kg de MS / truie / jour
  • Sous forme d’enrubannage (50% MS) : environ 0,8 kg de MS / truie / jour

 

L’économie possible en aliment concentré varie avec le niveau d’ingestion spontanée des fourrages grossiers.

Quelques repères :

  • Le pâturage (20% MS) en période de pousse de l’herbe remplace 1 kg d’aliment / truie / jour
  • L’apport d’ensilage (35% MS) à volonté remplace de 0,5 à 1 kg d’aliment / truie / jour
  • L’apport d’enrubannage (50% MS) à volonté remplace 0,5 kg d’aliment / truie / jour

Comportement des truies au pâturage

Un effet saison et espace

Les truies pâturent préférentiellement en fin de journée, soit dans les trois heures qui précèdent le crépuscule.

Le temps passé par jour à pâturer dépend de la saison. L’hiver, les truies se déplacent beaucoup, avec des périodes de pâture très courtes. Au printemps, au moment de la pleine croissance de l’herbe, les truies trouvent du fourrage à leur goût partout dans le parc. En revanche, en été et en automne, elles se concentrent sur les repousses et pâturent préférentiellement certaines zones du parc.

L’analyse de ce comportement incite à un pâturage rationné :

  • D’avril à septembre : en période de pleine croissance de l’herbe, les truies peuvent être cantonnées dans une surface plus petite (600 m2 par truie). L’autre partie (200 m2) du parc est alors mise en défens (mise en place d’une clôture pour que la truie n’ait pas accès à cette partie de la pâture) et peut être récoltée sous forme d’enrubanné vers le 15 mai, puis laissée au repos jusqu’en Octobre
  • D’octobre à mars : les truies gestantes ont besoin de pâturer l’hiver, ce qui justifie de leur consacrer une surface plus importante. Il est également possible de leur distribuer à cette saison, l’enrubanné récolté au printemps précédent.

Un effet individu lié à la hiérarchie sociale au sein du groupe

La grande variabilité individuelle constatée sur l’activité de pâturage peut être en partie attribuée à la compétition sévère que se livrent les truies lors de la distribution de l’aliment concentré. Les truies qui sont dominées dans le groupe au moment du repas d’aliment concentré, commencent à pâturer en fin d’après-midi, significativement plus tôt que les truies les plus dominantes. Ainsi, les jeunes truies, lorsqu’elles sont regroupées avec des animaux de plus fort gabarit, compensent la restriction alimentaire induite par la compétition, par une activité de pâturage plus soutenue.

Et pourquoi pas du pâturage tournant ?

La technique du pâturage tournant permet de maximiser la consommation d’herbe par les truies et contribue à mieux satisfaire leurs besoins en protéines grâce à la prairie. Un essai a été réalisé sur la ferme expérimentale porcine des Trinottières au cours des printemps 2017 et 2018.

 

Dispositif expérimental :

  • 12 paddocks de 270 m2
  • Couvert riche en trèfle
  • Aliment moins riche en protéines
  • 80% de la ration habituelle d’aliment complet
  • Durée de présence sur les paddocks :
    • 2 à 3 jours pour 8 truies de fort gabarit
    • 4 à 5 jours pour 8 truies de petit gabarit
    • Hauteurs d’herbe : 11 cm à l’entrée – 6 cm à la sortie

 

Principaux résultats :

  • 1,75 kg de MS ingéré / truie / jour avec une forte variabilité entre individus
  • Performances zootechniques comparables à celles des lots témoins avec ration alimentaire complète
  • Préférence marquée pour les légumineuses
  • Impact économique favorable : économie de 16% sur le coût alimentaire

 

Limites et préconisations :

  • Forte compétition alimentaire au moment des repas → alimentation individuelle (réfectoires)
  • Moindre motivation à pâturer en fin de gestation → revenir à une ration complète sur les 3 dernières semaines de gestation

Témoignage sur le pâturage tournant des truies gestantes

Comportement des porcs charcutiers au pâturage

Si l’élevage plein-air concerne environ la moitié des truies biologiques en France, l’engraissement des porcs en plein-air est beaucoup moins fréquent dans nos régions. En effet, pour engraisser des porcs biologiques en plein-air, il faut beaucoup de surface, car la densité à l’hectare est faible. Toutefois, certains éleveurs expérimentent des pratiques très innovantes comme le pâturage tournant des porcs charcutiers en plein-air.

Dans le cadre du projet OK-Net Ecofeed, un essai a débuté à l’automne 2019 chez un éleveur de porcs biologiques de la région des Pays de la Loire. Il expérimente actuellement la pratique de l’engraissement en plein-air, en utilisant diverses combinaisons de cultures fourragères. L'objectif est de fournir aux animaux une gamme diversifiée de fourrages tout au long de l'année, et d’évaluer l’intérêt du pâturage des porcs en fin d’engraissement sur la période de finition (à partir de 18 semaines d’âge). Les résultats attendus sont une diminution de la quantité d’aliment concentré distribué, et une amélioration de la qualité nutritionnelle des carcasses.

La première phase de l’essai a consisté à mettre en place des clôtures appropriées, aménager les parcelles de pâturage, et tester la conduite sur une première bande de porcs. Leur comportement a été observé durant cette période afin d’adapter le protocole de gestion des animaux. Le groupe de 50 porcs a rapidement adopté un comportement de pâturage. Deux parcelles de 0,5ha chacune ont été pâturées. Afin d’optimiser la valeur du fourrage chaque parcelle a été subdivisée en 2, soit un total de 4 paddocks. Après les 6 semaines de pâturage, le sol est resté préservé et la végétation a été bien consommée. Néanmoins, le lot de porcs était hétérogène, et la vitesse de croissance a été en moyenne plus faible que les performances habituelles de l’élevage. Cette première phase d’essai est très encourageante. Il semble important d’adapter la restriction alimentaire à la qualité du fourrage (des analyses peuvent aider à prendre des décisions), à la saison, et à la vitesse de croissance des porcs, en particulier celle des plus petits animaux.

L'engraissement des porcs en plein air

Distribution de fourrages grossiers aux truies

Pour favoriser une bonne qualité du couvert végétal, il est nécessaire d’effectuer des broyages lorsque les graminées ont déjà épié, ou bien des récoltes lorsque la hauteur d’herbe est trop importante avant l’arrivée des animaux. Ce fourrage pourra alors être distribué aux truies, lors des périodes où la pousse de l’herbe est faible.

Valeur d’un ensilage (graminées + légumineuses)

Avec un ensilage d’herbe à 35% de matière sèche offert ad libitum à des truies gestantes, les valeurs de consommation enregistrées varient de 2,5 à 9,2 kg bruts par jour (soit 0,8 à 3 kg de MS / truie/ jour). La consommation diminue en fin de gestation, probablement parce que l’intestin est comprimé par la croissance des fœtus. En moyenne, l’ensilage remplace de 0,5 à 1 kg de la ration quotidienne d’aliment concentré. Néanmoins, il peut y avoir une large variabilité entre les animaux. L’état d’entretien de chaque truie doit être soigneusement pris en compte, et le niveau de concentré ajusté individuellement.

Valeur d’un enrubannage (Ray grass anglais + trèfle blanc)

La ferme expérimentale porcine des Trinottières a testé la possibilité d’inclure dans la ration hivernale des truies gestantes, à partir de la confirmation de gestation, environ 1 kg de matière sèche/truie/jour d’herbe enrubannée. La teneur en matière sèche de l’enrubannage au moment de la distribution était de 50%. La consommation moyenne observée est de 1,6 kg brut par truie gestante et par jour (soit 800 g de MS / truie / jour) avec une assez forte variabilité individuelle. Cet apport d’enrubannage permet de diminuer de 15% la ration quotidienne d’aliment concentré, sans dégrader les performances de reproduction, ni l’état corporel des truies. De plus, la distribution de fourrages grossiers pendant la gestation entraîne une reprise de la consommation plus rapide et plus importante après la mise-bas, en lien avec le développement des organes digestifs.

Distribution de fourrages grossiers aux porcs charcutiers

Les fourrages grossiers sont des substrats très attractifs pour les porcs. Grâce à leur effet « récréatif », ils contribuent à réduire fortement l’agressivité entre les animaux. Ainsi, au-delà de leur valeur nutritive, les fourrages grossiers sont des alliés précieux pour améliorer le bien-être animal en élevage porcin biologique. La mécanisation de la distribution de fourrages par les courettes doit donc être réfléchie dès la conception des bâtiments porcins biologiques, en prévoyant la possibilité de manœuvrer avec des engins agricoles.

Moins d’ulcères gastriques grâce à l’ensilage d’herbe

En Suisse, l’institut de recherche sur l’agriculture biologique (FIBL) a travaillé sur l’apport d’ensilage d’herbe à des porcs en croissance. Les chercheurs observent que l’apport de fourrage grossier améliore la santé gastrique des porcs. Tous les porcs ont reçu des aliments concentrés. La moitié d’entre eux recevaient également de l’ensilage d'herbe à raison de 100 à 300 g de matière sèche par porc et par jour. A l’abattoir, les estomacs des porcs ont fait l’objet d’un examen macroscopique selon une grille de notation en 6 points. La note 0 correspondait à un estomac intact tandis que la note 6 correspondait à un ulcère total sur toute la surface de l’estomac. Les lots de porcs recevant de l’ensilage d’herbe ont obtenu une note moyenne de 1 avec une majorité des porcs notés 0. A l’inverse, les lots de porcs ne recevant pas d’ensilage d’herbe ont obtenu une note moyenne de 4,8. Selon les auteurs, l’apport de fourrages est un moyen bon marché et efficace d'améliorer la santé et le bien-être des porcs. Les fourrages grossiers, tels que l’ensilage d’herbe, peuvent satisfaire le besoin de fouissage des porcs et réduire les risques de morsures de queues puisque les porcs sont occupés à s’alimenter durant de plus longues périodes.

De l’enrubannage de luzerne pour réduire le coût alimentaire en engraissement

Dans le cadre du projet SECALIBIO, un essai a été conduit à l’INRA de Rouillé (86) pour mieux quantifier l’ingestion de fourrages grossiers par les porcs charcutiers biologiques et pour évaluer l’économie possible en aliments concentrés. Le fourrage distribué était un enrubannage de luzerne. Ce type de fourrage est facilement disponible, relativement riche en protéines (autour de 20% de MAT par kg MS), et facile à utiliser.

L’essai a comparé cinq conduites alimentaires différentes de 50 kg de poids vif jusqu’à l’abattage visant à moduler soit la quantité soit la qualité de l’aliment distribué. Les quatre lots expérimentaux recevaient de l’enrubannage de luzerne à volonté en plus de l’aliment concentré. L’enrubannage de luzerne a été bien consommé par les porcs charcutiers. Les consommations moyennes étaient de l’ordre de 500 g par porc et par jour et pouvaient aller jusqu’à 1,5 kg brut  en fin d’engraissement.

 

En pratique, la distribution de fourrages grossiers peut être réalisée soit dans un râtelier soit dans une auge par la courette d’accès au plein-air des porcs charcutiers. Le choix de la stratégie alimentaire en finition dépend des objectifs de croissance fixés par l’éleveur :

  • une restriction protéique modérée (10%) peut être entièrement compensée par l’apport d’enrubannage de luzerne sans affecter les performances de croissance. Le coût du fourrage est compensé par l’économie réalisée sur le prix de l’aliment (moins riche en protéines).
  • avec une restriction protéique plus sévère (de 15 à 22%), la distribution d’enrubannage de luzerne permet d’améliorer l’indice de consommation et les performances de carcasse en acceptant une réduction de la vitesse de croissance. Le coût du fourrage est largement inférieur à l’économie réalisée sur la quantité d’aliment concentré distribuée et/ou sur le prix de cet aliment (moins riche en protéines).

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